Témoignage de Térence, jeune adulte implanté, en études supérieures

Térence a récemment rejoint l’association, il a spontanément proposé de témoigner pour partager son expérience et son vécu, en espérant pouvoir aider les parents et leurs enfants.

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1/ Bonjour Térence, pourrais-tu te présenter ?

Bonjour, je m’appelle Terence Breant, j’ai 18 ans et je suis actuellement étudiant à l’ESSCA à Angers pour 5 ans ! Je suis quelqu’un de bienveillant et de persévérant.

2/ Peux-tu nous raconter à quel âge elle est survenue ta surdité (de naissance ou non) ?

Je suis sourd de naissance, et j’ai fait ma première opération à l’âge de 15 mois pour mon implant droit et ma deuxième lorsque j’avais 5 ans pour l’implant gauche.

3/ Comment as-tu vécu (et/ou comment ta famille a vécu) cette nouvelle ?

Quand ma famille, en particulier mes parents, a appris cette nouvelle, ils ont été confrontés à une décision qui aurait un impact majeur sur mon avenir. Ils devaient choisir entre deux options :

– La première était de ne pas subir d’opération et de m’inscrire dans une école spécialement conçue pour les personnes atteintes de surdité, où j’aurais appris les langages des signes.

– La deuxième option était de me faire implanter un système d’électrodes dans la cochlée , et un aimant dans la tête sous le cuir chevelu ; cela me permettrait de porter un appareil auditif (pour ma part, je porte un implant de la marque Cochlear) au-dessus de mes oreilles.

Ils ont opté pour la deuxième solution, et je suis satisfait de ce choix.

4/ Peux-tu nous parler de ton adaptation à l’implant cochléaire ?

Je n’ai pas de souvenir d’avant mes implantations parce que j’étais trop petit. En revanche, mes implants cochléaires sont changés tout les 5 ans, j’ai donc m’adapter à chaque changement d’appareil, ce qui prend seulement quelques jours.

Par exemple, les deux premiers appareils avaient une batterie externe reliée à un câble. Ce câble cassait tout le temps, ce qui m’énervait beaucoup durant mon enfance. Ensuite, c’était des appareils rechargeables, type contour oreille avec batterie intégré (Cp 810), c’était plus discret mais encore volumineux et cela me posait un problème pour mettre un casque (vélos, ski).

Enfin depuis deux ans, j’ai des appareils Consos 2 sans contour oreille. Ça été plus compliqué de m’adapter car le capteur de son est disposé dans un angle différent : je n’entends plus au niveau de l’oreille mais plutôt au niveau de la tête. Les points positifs : les appareils sont entièrement cachés par mes cheveux longs, la batterie est entièrement rechargeable (je n’ai plus de pièce détachée) et les batteries durent plus longtemps.

5/ Quelles difficultés as-tu rencontrées ? Quelles solutions as-tu réussi à mettre en place ?

Au début de ma scolarité, j’ai rencontré des difficultés à entendre les professeurs en classe. Heureusement, Cochlear propose une solution pour surmonter ces défis. Il s’agit d’un petit microphone qui se connecte directement à mon appareil auditif. Je le remettais à mes enseignants pour qu’ils puissent l’attacher à leur haut, ce qui m’a permis d’entendre beaucoup mieux en cours.

Aujourd’hui, depuis que j’ai commencé mes études à Angers, je vis dans un studio situé dans une résidence universitaire, et je vis désormais seul. Cependant, cela présente un risque pour ma sécurité, car je dois recharger mes appareils auditifs la nuit, ce qui signifie que je ne pourrais pas être alerté en cas d’incendie ou d’autres urgences. Pour remédier à cela, j’ai commandé une sonnette et un détecteur de fumée qui sont directement connectés à un réveil doté d’un vibreur, que je place sous mon matelas.

6/ Après ton implantation, quel accueil as-tu reçu au sein de tes proches (famille, amis…) ?

Quand je dis à mes amis ou à mes collègues de classe ou autres que je suis implanté et que je porte des appareils auditifs, ils sont tous intrigués par la manière dont cela se fixe sur ma tête, comment ça fonctionne, comment ça se recharge, s’il est waterproof, etc. Ça les intéresse mais ils ne le trouvent pas nécessairement bizarre.

7/ Quel impact cela a-t-il eu dans ta vie, tes études, ton travail ?

Mon handicap n’a pas eu un réel impact significatif sur ma vie quotidienne. Même si de temps en temps, lorsque je suis avec mes proches dans des endroits bruyants, comme les restaurants ou des soirées, il m’arrive d’avoir du mal à entendre ou à comprendre les conversations, mais avec le temps et avec des réglages réguliers à l’hôpital Necker, au cours des années, j’ai appris à m’adapter à ces situations.

8/ Quelles adaptations ont été mises en place à l’école ?

À partir de la troisième, j’ai bénéficié d’un tiers-temps supplémentaire pour mes examens, ainsi que d’une dispense pour les épreuves orales, principalement pour les langues étrangères. J’ai également reçu une aide écrite pour les dictées que j’avais au collège.

Notamment comme je l’ai mentionné dans une question précédente, j’avais un micro qui était mis en place pour les professeurs afin de faciliter ma compréhension en classe.

9/ Peux-tu nous parler de ton parcours étudiant ? (Diplôme, niveau d’étude)

J’ai obtenu mon brevet avec mention bien, suivi du baccalauréat avec mention assez bien. J’ai également passé un examen d’anglais (Cambridge) pour certifier mon niveau.

Par la suite, j’ai réussi les concours d’entrée en école supérieure, ce qui m’a permis d’intégrer l’ESSCA, une école de management dont le campus est situé à Angers. Le programme que j’ai décidé de suivre dure 5 ans et vise un diplôme de Bachelor, Master inclus.

10/ Quelles sont tes relations avec tes amis, camardes de classe ? Y a-t-il des particularités ou es-tu intégré au même titre que les autres ?

Je n’ai pas de relations personnelles similaires à la mienne, mais j’entretiens des amitiés solides avec la plupart de mes amis qui sont au courant de mon handicap, sans que cela ne pose le moindre problème.

En cas de nécessité, je peux compter sur le soutien de ma famille et sur l’administration de mon école qui sont toujours là pour moi. Je n’ai jamais eu besoin d’un tuteur pour m’assister dans mes études tout au long de ma scolarité.

11/ Y a-t-il un domaine/ une activité que tu conseillerais à nos jeunes implantés de privilégier ? Pourquoi ?

Faire du théâtre, ça aide à apprendre par cœur et donc ça aide à bien construire ses phrases (un peu comme l’orthophonie mais en plus sympa) et à prononcer correctement.

12/ As-tu des conseils à transmettre aux personnes qui ont été implantées tardivement ? Ou implantées tout court ?

N’hésitez pas à communiquer ouvertement avec les gens concernant votre surdité de naissance ou progressive et l’utilisation d’appareils auditifs. Cela inclut vos amis, ainsi que votre professeur et vos collègues de travail. J’ai appris cette leçon plus tard dans la vie, mais il est préférable de le mentionner dès le début de vos relations avec votre groupe d’amis, vos collègues, etc., plutôt que de les laisser découvrir par eux-mêmes que vous portez des appareils auditifs. En fait, annoncer cela vous-même vous permet d’attirer directement l’attention de votre entourage.

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****** Merci beaucoup Térence pour le temps que tu nous as consacré. ******